Prestidigitation par Thierry Collet

 

 

Je mène depuis une quinzaine d’années une recherche de renouvellement des codes et de l’esthétique de la prestidigitation. C’est une quête de sens pour, à la manière du nouveau cirque, ne plus considérer la performance technique ou physique comme une fin en soi, mais plutôt comme un moyen, un vocabulaire au service d’écritures scéniques, de dramaturgies et de visions d’artistes.

Depuis plusieurs années, Jean et moi poursuivons des conversations sur la prestidigitation ; échanges de techniques et de «trucs», de secrets de fabrication, mais aussi de réflexions sur l’origine et le devenir de la magie envisagée comme un art. Notre collaboration sur La Mort d’Adam est le prolongement de ce dialogue et affirme notre volonté de faire un tour de magie plus qu’une simple énigme – comme on le dirait d’un rébus, d’un roman policier ou de mots croisés – mais qu’il renvoie à des mystères plus vastes, des inquiétudes plus profondes, des questionnements humains plus troublants.

A l’origine de la magie, il y a le shaman, le sorcier. C’est lui qui donne un sens aux mystères du monde – phénomènes climatiques, éclipses, mort et maladie, etc. ; c’est un homme de pouvoir, il est en même temps médecin, guide spirituel, conseiller politique, autorité morale. Depuis toujours le magicien fait le lien entre la volonté de comprendre le réel et la nécessité de s’en émerveiller, entre l’esprit scientifique et le besoin de croire.

Quelques sensations et pistes au début du travail d’écriture scénique de La Mort d’Adam : envisager le magicien comme un fabricant de rituels et de mythologies, faire constamment le lien entre le contemporain et l’archaïque, ne pas trop utiliser d’objets mais que le corps soit le terrain d’expression des effets magiques, ne pas coller à la narration mais se glisser dans l’entrelacs des signes textuels, visuels et auditifs, avoir de l’humour et de la fantaisie et le sens des effets de surprise.