Carnet de bord # 1 Le Clown du rocher

 

Par Catherine Lefeuvre & Jean Lambert-wild

 

Les origines de l’origine

Pourquoi sommes-nous réunis en ce lundi 12 juin 2017 dans ce magnifique parc du Pôle Cirque de Nexon, cœur battant de la création circassienne, niché dans la campagne verdoyante limousine ? Le printemps court vers sa fin et il fait chaud, très chaud, une chaleur caniculaire que la proximité de l’étendue d’eau autour de laquelle nous nous sommes installés ne permet pas d’atténuer.

Ce qui nous réunit aujourd’hui et pour quelques jours, c’est le Clown du rocher et ses multiples origines, qui va prendre vie dans ce parc, au cours du Festival la Route du Sirque 2017 les vendredi 25 et samedi 26 août 2017

 

Artiste bousier, poète en action

Jean Lambert-wild est un poète dont la langue est faite du bois des essences exotiques qui bordent les chemins flamboyants de son enfance, à l’Ile de la Réunion. « Le clown est le poète en action » dit Henri Miller : de l’écriture comme action d’un corps au corps actionné par la langue, c’est bien de cela dont il s’agit avec ce Clown parleur qui forme le dessin de cette aventure, en trois temps, en trois textes :

D’abord il y a eu le Clown des marais, premier volet écrit et joué à Singapour avec son complice Marc Goldberg, qui nous plonge dans les marécages réunionnais de son enfance, étendues fangeuses et inhospitalières, mais aussi marais aussi voluptueux qu’un bain de bébé. Sa langue s’est formée là, elle dégorge des milles effluves de ses recoins humides.

Puis il y aura le Clown du ruisseau. Des marais, s’échappent des filets d’eau, qui font ruisseaux, qui font chemin et qui feront les entrées clownesques qui délieront l’action poétique derrière la langue. Ce texte, ce jeu, est à venir. Il doit arriver vite car l’action clownesque n’attend pas, n’attend personne, ne veut pas attendre. Rendez-vous est donné la saison prochaine à Limoges et de nouveau à Singapour pour cela.

Puis une troisième voie est envisagée, avec le Clown du rocher. Une autre voix aussi, pour dire à nouveau les origines et les chemins de ce poète en action pris dans le bestiaire imaginaire d’un Sisyphe coprophile. Là se mêlent et dialoguent Albert Camus, Jean-Henri Fabre, le scarabée royal rouleur de bouse et bien d’autres poètes et philosophes mandibulaires, pour raconter la fable de cet artiste-bousier, clown blanc dévalant les pentes des cirques réunionnais puis roulant sa boule au milieu d’une piste de cirque. 

La crème de marron

Un autre point d’origine du Clown du rocher est la rencontre entre deux artistes qui se respectent et s’estiment : Jean lambert-wild et Martin Palisse, tous deux artistes, dirigeant deux lieux de création, sur le territoire limousin : le Théâtre de l’Union – Centre Dramatique national et le Sirque – Pôle National des Arts du Cirque basé à Nexon.

Leurs points communs : deux corps, à la même résonnance, rapides, fins, incisifs, toujours en mouvement. Deux regards aussi, droits et alertes, avec la même recherche de perspective. Deux corps qui aiment la crème de marron, en tube ou en pot, partout et tout le temps. Deux corps furieusement vivants, prêts à dompter la langue qu’elle soit corporelle ou écrite, pourvue qu’elle crée la fureur, la beauté, les larmes, le rire, l’ambiguïté, la suspension du temps, la poésie.

Jean Lambert-wild et Martin Palisse ont donc décidé de travailler ensemble pour donner un geste artistique court et intense, sans contrainte ni enjeu majeur de production, une rencontre sur le terrain de l’art, pour voir ce qu’il adviendra de la conjugaison de leurs deux corps, de ces deux artistes-bousiers : l’un, jongleur-poète à l’action aérienne, l’autre clown blanc-poète à l’action tonitruante.

Spectacle

Calenture N° 227 de l’Hypogée